France

One in two female scientists say they have personally experienced sexual harassment in the workplace.

Une femme scientifique sur deux révèle avoir été victime de harcèlement sexuel au travail

C’est ce que dévoile l’étude internationale sans précédent sur l’égalité femmes-hommes en science menée par Ipsos pour la Fondation L’Oréal et conduite auprès de 5 200 scientifiques de 117 pays. L’étude, qui a interrogé aussi bien des hommes que des femmes, s’est penchée sur le sexisme et le harcèlement sexuel dans le monde scientifique, et en a évalué les impacts.

16 mars 2023        Carrière / Science / Femme

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AUTEUR(S)     

Alice Tétaz Directrice d'études, Public Affairs 

Federico Vacas Directeur Adjoint du département Politique et Opinion - Public Affairs

 

Chiffres clés

  • 49 % des femmes scientifiques révèlent avoir été personnellement confrontées à au moins une situation de harcèlement sexuel au cours de leur carrière, soit 1 femme scientifique sur 2.
  • Pour près de la moitié des femmes scientifiques qui ont été victimes de harcèlement sexuel (47 %), cela s’est produit dans les 5 dernières années, soit après l’émergence du mouvement #MeToo ; pour près d’un quart des victimes (24 %), cela s’est produit dans les deux dernières années.
  • Pour 65 % d’entre elles, la ou les situation(s) de harcèlement sexuel à laquelle (ou auxquelles) elles ont été confrontées a (ont) eu un impact négatif sur leur engagement dans la science et leur carrière.
  • Pourtant, à peine un peu plus de la moitié des victimes de harcèlement sexuel (53 %) en a parlé, dont seulement 1 sur 5 (19 %) au sein de son institution.
  • 7 scientifiques sur 10 estiment qu’on ne parle pas assez du sexisme et harcèlement sexuel dans la recherche.
  • Et 64 % des personnes interrogées regrettent l’insuffisance et l'inefficacité des actions pour prévenir ou lutter contre le harcèlement sexuel au travail.

Une chercheuse sur deux a vécu au moins une situation de harcèlement sexuel sur son lieu de travail

Déjà alertée par les résultats d’une première enquête menée en 2019[1] auprès du réseau des alumnae (anciennes lauréates et Jeunes Talents) du programme L'Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science, la Fondation L’Oréal a souhaité mener une étude de plus grande envergure pour mieux cerner les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes en sciences au quotidien.

Les résultats de cette étude internationale confirment les inégalités qui persistent et l’urgence d’une mobilisation de grande ampleur.

D’après l’étude menée par Ipsos pour la Fondation L’Oréal, 49 % des femmes révèlent avoir subi du harcèlement sexuel au travail dans le milieu scientifique, soit une femme scientifique sur deux.

Un fait social qui perdure 

Si le milieu de la recherche et des sciences n’est pas exempt de violences, les dénonciations des abus ne semblent pas avoir résonné de la même manière, surtout dans ce secteur où les femmes restent particulièrement sous-représentées.

Le mouvement d’octobre 2017, #Metoo, n’a pas eu d’effet suffisant sur les comportements au sein du milieu scientifique : pour 47 % des victimes ces faits sont arrivés au cours des 5 dernières années, et pour près d’un quart (24 %) il y a moins de 2 ans.

Sans surprise, les situations de harcèlement sexuel frappent plus souvent les jeunes chercheuses. L’étude révèle en effet que 64 % des femmes victimes de harcèlement l’ont été au moins une fois au début de leur carrière.

Des conséquences immédiates et durables

Les conséquences du harcèlement sexuel au travail sont nombreuses ; parmi les personnes victimes, 50 % se déclarent mal à l’aise au travail, 30 % vulnérables et 21 % déclarent même avoir perdu confiance en elles.

Au-delà de l’impact physique et moral, le harcèlement sexuel peut constituer un véritable frein dans les carrières scientifiques. 2/3 des répondantes confrontées à un ou plusieurs cas de harcèlement sexuel (65 %) déplorent ainsi au moins un impact négatif sur leur carrière, parfois irrémédiable.

En raison de la situation de harcèlement sexuel à laquelle elles ont été confrontées, une victime sur deux a mis en place des stratégies d’évitement envers certains membres du personnel (52 %), une sur quatre ne s'est plus sentie en sécurité sur son lieu de travail (25 %), 20 % ont perdu confiance en leur institution, 15 % se sont - malgré elles - désengagées dans leur carrière, et 12 % ont manqué des opportunités professionnelles.

Un contexte de sexisme généralisé et persistant qui banalise les violences

Le Rapport 2023 sur l’état du sexisme en France, publié en janvier dernier par le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, statue que le sexisme ne recule pas en France et qu’au contraire, il perdure ; pire, que ses manifestations les plus violentes s’aggravent.

C’est un constat similaire que dresse l’enquête conduite par Ipsos pour la Fondation L’Oréal dans le milieu scientifique.

Si une femme scientifique sur deux a été victime de harcèlement sexuel, plus de huit femmes sur 10 (81 %) ont été personnellement confrontées à au moins une situation de sexisme au cours de leur carrière scientifique.

La loi du silence

Cette persistance du sexisme au quotidien - pourtant préoccupante car elle peut conduire à des manifestations les plus violentes, peut s’expliquer par le règne d’une omerta dans ce milieu. Seules 19 % des personnes confrontées à une situation de harcèlement sexuel en ont parlé à leur institution.

En parallèle, si près de 9 chercheurs sur 10 (86 %) - tous sexes confondus - disent avoir été témoins d'au moins une situation de sexisme dans leur carrière, à peine la moitié d’entre eux a dénoncé les faits dont ils ont été témoins (56 %).

Parmi les témoins qui ne se sont pas exprimés, la moitié (49 %) disent avoir entendu des histoires de personnes qui ont été impactés négativement pour avoir parlé et 39 % ont craint les représailles.

L'urgence d’actions concrètes pour lutter contre ce problème

Au-delà de la peur de parler pour les raisons évoquées plus haut, plus de deux tiers des personnes interrogées (64 %) estiment que les actions mises en place par les institutions elles-mêmes sont encore insuffisantes ou inefficaces.

Pour Alexandra Palt, Directrice Générale de la Fondation L’Oréal : « Depuis la création de la Fondation en 1998, nous l’affirmons : le monde a besoin de science et la science a besoin des femmes. Toutefois, nous ne pouvons encourager les jeunes femmes à se diriger vers une carrière scientifique, sans avoir l’assurance qu’elles puissent s’épanouir en toute sécurité dans leur environnement de travail. Notre mission première est de promouvoir, valoriser et soutenir les chercheuses. Celle-ci passe donc aussi par ce travail de prévention, de sensibilisation et surtout de mobilisation, afin d’éradiquer ces comportements intolérables et de faire en sorte que chaque femme puisse exprimer pleinement son potentiel.”.

Pour enrayer ces comportements, la Fondation et tous ses soutiens invitent l’ensemble des institutions scientifiques à prendre leurs responsabilités et à œuvrer pour faire évoluer les comportements et les mentalités : à la hauteur des enjeux et cela autour de 3 grands axes :

  • Une politique zéro tolérance ; 
  • Une sensibilisation massive et obligatoire :
  • Un engagement budgétaire.

Ainsi, pour la rentrée 2023, les institutions sont appelées à répondre à cette invitation à travers une prise de parole publique, au nom de l’institution, et la mise en place des mesures suivantes:

  • Un dispositif de signalement interne efficace;
  • Un baromètre annuel dédié;
  • Un plan de formation déployé à tous les niveaux et renouvelé;
  • La mise en place d’une certification obligatoire de climat inclsif pour pouvoir encadrer des thèses;
  • Un engagement budgétaire dédié au sujet et rendu public comprenant une garantie de temps dédié pour les référentes et référents.

 

 

 

A propos de la Fondation L'Oreal

La Fondation L’Oréal s’engage aux côtés des femmes pour leur permettre d’exprimer leur potentiel, reprendre la main sur leur destin et avoir un impact positif sur la société́, à travers trois domaines d’intervention : la recherche scientifique, la beauté́ inclusive, et le changement climatique.

Depuis 1998, le programme L’Oréal-Unesco Pour les Femmes et la Science a pour vocation d’accélérer les carrières des femmes scientifiques et de lutter contre les obstacles qu’elles rencontrent, pour qu’elles puissent contribuer à la résolution des grands défis de notre temps. En 23 ans, le programme a soutenu plus de 3 900 chercheuses originaires de plus de 110 pays. Il valorise l’excellence scientifique et cherche à inspirer les jeunes femmes pour les encourager à s’engager dans des cursus scientifiques.

Convaincue que la beauté contribue au processus de reconstruction de soi, la Fondation L’Oréal accompagne des femmes fragilisées à améliorer leur estime d’elles-mêmes en leur donnant accès à des soins de beauté́ et de bien-être gratuits. Elle favorise également l’accès à l’emploi de femmes vulnérables à travers des formations d’excellence aux métiers de la beauté. En moyenne, environ 16 000 personnes par an bénéficient de ces soins beauté et de bien-être, et plus de 18 000 personnes ont pu participer à des formations dédiées, depuis le début du programme.

Les femmes, enfin, sont victimes d’inégalités et de discriminations de genre persistantes, accélérées par le changement climatique. Alors même qu’elles sont les premières affectées par les conséquences du réchauffement, elles sont sous-représentées dans les instances de décisions. Le programme Femmes et Climat de la Fondation L’Oréal soutient notamment les femmes porteuses de projets répondant à l’urgence climatique, et sensibilise à l’importance de solutions qui prennent en compte l’intersectionnalité́ des problématiques de genre et de climat.

A propos de cette enquête

L’étude a été conduite du 26 juillet au 16 septembre 2022. Les interviews ont été réalisées en ligne par le biais d’un questionnaire adressé par Ipsos à des chercheurs et chercheuses dans les domaines de la science, de la technologie, de l'ingénierie et des mathématiques, issus de plus de 50 institutions différentes (67 % d’établissements publics et 12 % d’établissements privés). Au total, 5 184 personnes ont été interrogées (22 % d’hommes et 76 % de femmes), dans 117 pays dont la France avec 2 269 répondants.

[1] Etude intitulée « s’attaquer aux obstacles auxquels se heurtent les femmes en science accélèrera les progrès de l’humanité » conduite entre le 29 juillet et le 19 octobre 2019 avec Kite Insights auprès de 668 alumni (327 réponses au total).

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